jeudi 7 février 2013

Bénin-Campagne agricole 2013-2014

Des incertitudes sur le coton
La campagne agricole 2013-2014 pointe déjà son nez et tout porte à croire que les acteurs de la filière coton sont loin d’accorder leur violon sur le mécanisme approprié pour mieux gérer le cotonnier. Les concertations en cours ne semblent pas créer les conditions d’une campagne apaisée.
Le sort réservé à la gestion de la filière coton au cours de la campagne agricole 2013-2014 est inconnu. Et mieux que le public, c’est les acteurs eux-mêmes qui expriment ce sentiment d’incertitude qui n’augure rien de bon pour l’économie béninoise en général. En effet, le coton est de loin le premier produit de rente pour l’économie béninoise. La filière coton a un potentiel de croissance économique dont le Bénin ne peut se passer à l’étape actuelle de l’économie nationale. Il s’agit de réalité que tous acteurs du monde économique béninois internalisent à commencer par les gouvernants. C’est d’ailleurs conscient de cette réalité que le chef de l’Etat n’a pas hésité à décréter la campagne cotonnière 2012-2013 une campagne exceptionnelle et spéciale. Les partenaires au développement du Bénin ont intégré cette donne au point d’évoquer les difficultés liées à la gestion de la filière coton dans tous les rapports qu’ils ont produits sur le Bénin au cours de ces derniers mois.
Pourtant il y a des zones d’ombre
Déjà plusieurs rencontres d’échange et de concertation ont regroupé les acteurs de la filière coton. Tant au sein des entités homogènes que dans des enceintes bien hétérogènes. L’Association interprofessionnelle de coton (Aic) au premier rang, à la suite de la campagne exceptionnelle finissante, est conviée à la table en présence de membres du gouvernement et des partenaires techniques et financiers. Seulement, à y voir de près, les discussions engagées ne donnent pas lieu à un dialogue qui augure d’une conclusion largement partagée. De sources proches des acteurs de la filière, tout porte à croire que le gouvernement a choisi d’adopter le « zonage » et ne semble ouvert à plus aucune alternative possible. Pendant ce temps, les partenaires techniques et financiers manquent de s’illustrer en médiateurs et tout semble évoluer vers l’impasse. Toute chose qui risque fort bien d’aboutir à une situation indélicate pouvant engendrer un contexte favorable à une nouvelle campagne exceptionnelle. Pourtant, les discussions engagées jusque là avaient pour objectif de régler les incompréhensions et de repartir sur de nouvelles bases arrêtées de commun accord entre acteurs de la filière. L’encadré ci-après est illustratif de la situation actuelle qui n’augure d’aucune certitude.
Encadré : Conclusion de la réflexion de l’AIC sur la nouvelle gouvernance de la filière coton
Au total, le document se fonde sur un tissu d’affirmations et de suppositions sans diagnostic et analyses convaincants, pour plaquer un modèle retenu par avance et à l’exclusion des autres modes de gouvernance ; de plus, sans réellement tirer les leçons d’une analyse comparée des différents modes de gouvernance de la filière coton dans la sous région. Les vrais problèmes qui handicapent la productivité et l’augmentation de la production, problèmes partagés avec l’ensemble des pays de la sous-région (dont ceux fonctionnant selon le modèle du zonage) sont occultés. Aucun modèle ne sera viable s’il ne réussit pas à juguler ces handicaps. L’on doit tout d’abord admettre que la réorganisation de la filière, quel qu’en soit le schéma, ne peut apporter les résultats escomptés si l’on n’en définit pas clairement les préalables et principes  à prendre en compte ainsi que les objectifs à atteindre.
Le modèle de zonage n’est donc pas en soi une panacée. Même en cas de nécessité d’adoption de ce modèle au Bénin, il est impérieux d’en définir la  forme adaptée aux conditions spécifiques du pays en apportant des réponses adéquates à certaines questions précises, à savoir:
Qu’entend-on par zonage et quelles différentes formes peut-il prendre?
Quels sont les critères de répartition des communes et/ou des usines d’égrenage selon les zones?
Quels sont les préalables à lever et le délai requis dans les conditions actuelles pour aboutir à un zonage viable permettant d’atteindre les performances  recherchées pour la filière coton au Bénin?
Quel système transitoire de gouvernance  de la filière doit-on mettre en place et pour quelle durée, en attendant l’aboutissement du processus du zonage?

Les caractéristiques propres à chacun des modes de gouvernance de la filière coton doivent faire l’objet d’une analyse objective permettant de dégager le meilleur mode possible à retenir. Quelle que soit l’option, des principes et règles spécifiques doivent être définis en vue de baliser le terrain et de limiter les risques de dérapage. Cela suppose la mise en place d’un schéma de gestion transitoire en concertation avec les vrais acteurs de la filière pour une durée à déterminer aux fins, entre autres, de construction des statistiques plus crédibles permettant d’élaborer une véritable stratégie de développement de la filière coton béninoise.
En sus des aspects ci-dessus évoqués, d’autres questions en suspens méritent des clarifications notamment :
- Sous quelle forme associative pourrait se constituer les Sociétés cotonnières attributaires des zones?
- Comment aborder la question du mode de fixation des prix d’achat coton graine, des prix de vente des intrants agricoles. etc.?
- Sous quelle forme juridique matérialiser de façon durable les relations entre les différents acteurs professionnels d’une part, et entre eux et l’Etat d’autre
part ?
- Comment assurer la prise en charge de certaines fonctions à caractère transversal pour l’ensemble des acteurs professionnels de la filière?
- Comment organiser la participation des producteurs de coton et des communes dans le capital des sociétés d’égrenage de coton?
- Comment organiser ou établir le développement équilibré des régions dans le cadre de la politique de décentralisation prônée par le Gouvernement?
- Quels seront les critères de sélection des investisseurs dans les zones retenues après le démantèlement de la SODECO?
- Qui prendra en charge les coûts de démontage et de réinstallation des usines dans les zones identifiées?
Ce Sont là autant de questions et de préalables à prendre en considération pour éviter de commettre des erreurs dans l’appréciation d’un sujet aussi complexe que le coton en faisant des choix inopportuns qui seront préjudiciables à l’économie béninoise.
Dans tous les cas, l’assainissement étant considéré désormais comme une question relativement maîtrisée, (à condition que les effets induits par le PARFCB soient maintenus), l’augmentation substantielle du niveau de, production de coton graine reste le défi majeur actuel à relever, aussi bien par des actions spécifiques au niveau de chaque famille professionnelle en ce qui la concerne, qu’à travers des actions transversales sous l’égide d’une Interprofession regroupant l’ensemble des acteurs avec le soutien actif de l’Etat. Vu sous cet angle, la réorganisation de la filière coton au Bénin ne saurait se limiter à la seule mise en place d’un zonage à contours d’ailleurs mal définis, mais devrait plutôt procéder d’un diagnostic objectif des dysfonctionnements et d’un processus associant toutes les parties prenantes sans exclusive. Le Secrétariat permanent de l’AIC est disposé, comme à l’accoutumée, à apporter sa contribution pour une réflexion saine et constructive en vue de la mise en place d’un cadre institutionnel cohérent et sécurisé pour le développement du secteur coton au Bénin.

Décembre 2012
Le Secrétariat Permanent de l’AIC

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